Montréal – Partie 2

Comme on vous le disait dans la première partie, à Montréal il se passe plein de trucs en rapport avec l’agriculture urbaine. Et si on vous a livré un bon échantillon de ce qui se passe du point de vue associatif, on va maintenant passer au côté business, les affaires plus « entrepreneuriales »  qui nous intéressent aussi beaucoup!

Pousse-Menu : 26 ans de jeunes pousses!

Une des premières entreprises rencontrées à Montréal est l’impressionnante mini-fabrique de jeunes pousses : Pousse-Menu. On rencontre Philippe, qui fait tourner la machine depuis pas moins de 26 ans et depuis le début, la production ne s’est pas arrêtée une seule fois malgré un chemin semé d’embuches. C’est donc entre malchance pour maintenir ses financements, un incendie et 3 déménagements que l’entreprise a maintenu et optimisé au fil du temps une production de jeunes pousses qui rayonne dans tout le Québec.

Vous commencez à le savoir, on est pas fan des longues explications, par contre on aime les petits dessins, donc on vous a résumé grosso modo le fonctionnement de la production comme suit :

Schémas article Mtl P2 Pousse menu

Vous remarquerez que ce processus industriel demande finalement assez peu d’intrants mais nécessite un bon approvisionnement en semences. Côté consommation d’eau et d’électricité, les dépenses ne sont pas affolantes, d’une part parce que les systèmes sont ultra optimisés (sélection de longueurs d’ondes spécifiques pour la lumière, économie d’eau avec un système de brouillard artificiel malin et très performant) et d’autre part parce que l’eau et l’électricité ne sont pas trop coûteux dans la région de Montréal.

IMG_9769Une petite ambiance club de strip-tease tropical pour faire dresser les jeunes pousses.

Ici, on produit tout de même une tonne de jeunes pousses par semaine pendant toute l’année (les récoltes sont quotidiennes et tout le monde travaille en flux tendu). Et d’ailleurs, n’oublions pas de vous préciser que faire tourner cette jolie production demande le travail de 17 petites mains (de la gestion du compost à la livraison en passant par le touillage de la vinaigrette). Si aujourd’hui l’entreprise est toujours en situation un peu instable (locataire de ses locaux peu adaptés à leur production, une rentabilité qui peine à voir le jour suite aux malchances successives) Philippe nous explique qu’il souhaite acquérir des locaux et en être propriétaire d’ici quelques années. Son objectif étant d’intéresser des investisseurs potentiels en montrant une chaîne de production  » qui présente bien ».

IMG_9761La salle de gestion du compostage, astucieusement organisée grâce à des caisses métalliques et un tire palette mécanique. Retourner et surveiller du compost est donc pratique et demande peu d’effort physique!

Au final, vous avez peut être l’impression qu’on vous a livré beaucoup des secrets de Pousse-Menu, mais à vrai dire, ça n’est pas du tout un problème pour Philippe. Il nous explique que son projet qu’il mène depuis si longtemps a deux grands objectifs qui sont intimement liés : améliorer la santé publique en proposant un mode d’alimentation sain et partager son savoir faire pour encourager d’autres initiatives qui voudraient s’inspirer de Pousse-Menu. Franchement, on dit bravo et on a hâte de voir si l’avenir leur réserve des jours meilleurs!

Rencontre avec les Urbainculteurs

Un des premiers acteurs auxquels on pense quand on parle d’agriculture urbaine au québec, ce sont surement les Urbainculteurs. Implantés à Québec (la ville) et plus récemment à Montréal, ils sont partout et médiatiquement ultra visibles. Nous avons eu la chance de rencontrer Nicolas Ste-Marie, responsable de la branche montréalaise. Un bonhomme dynamique qu’on sent fier de nous parler de l’empire des Urbainculteurs. On emploie le mot « empire » volontairement, non pas parce qu’il s’adit de tyrans, mais plutôt parce que le nombre de réalisations est impressionnant.

En très bref, les Urbainculteurs, on pourrait comparer ça à un bureau de conseil en agriculture urbaine, mais c’est en fait une association à but non-lucratif qui fait un peu plus que ça. Bien entendu, c’est chez eux que vous pourrez vous approvisionner en matériel de pointe pour vous lancer dans l’urban farming et entendre des conseils techniques plus qu’avisés pour avoir une production digne de ce nom. Mais l’association, parce qu’elle est stable économiquement (et c’est rare en agriculture urbaine comme vous avez pu le constater) peut payer ses employés avec un salaire bien  plus élevé que le minimum (1,5 fois) et a une marge de manœuvre qui lui permet d’aider et de donner à des familles ou des associations.

On nous fait vite comprendre que pour les Urbainculteurs, il est tout à fait possible d’atteindre des niveaux de productions similaires voire supérieurs à du maraîchage classique, tout dépend de l’investissement qu’on met à s’occuper de ses petits fruits et légumes! Et niveau technique d’ailleurs, si les Urbainculteurs, c’est une affaire qui marche, c’est aussi grâce à leur produit phare : le Smartpot qui  n’est rien d’autre qu’un pot de fleur souple d’un aspect très basique, mais dont la conception n’est pas aussi simple qu’on pourrait le croire!

IMG_9872Les rangs de Smartpots des Urbainculteurs sur le toit du palais des congrès

Pour faire simple, le Smartpot c’est cool parce que c’est léger, ça se lave facilement, c’est très solide (vous pouvez déceler les contrefaçons en voyant si le tissu se déchire) et ça respire. Contrairement aux pots en plastique rigide, on nous explique qu’un avantage majeur est le fait que les plantes ne créent pas de chignon de racines (vous savez, cet espèce de tourbillon plein de nœuds qui fait le tour du pot quand vous sortez la plante et la terre) et donc sont beaucoup moins sensibles au gel.

Donc ça, c’est la version des Urbainculteurs, nous on a plutôt tendance à croire une personne qui a une très bonne connaissance technique de l’agriculture et l’horticulture, mais on nous a quand même fait quelques critiques des Smartpots par rapport à d’autres techniques qu’on trouve en agriculture urbaine. Notamment, le fait que le matériau « respire » ferait que l’on perd de l’eau (même si on ne nous a pas dit en quelle quantité) et que le tissu soit trop fragile et se déchire. On nous a en revanche fait l’éloge d’autres bacs de culture à réservoir d’eau qui sont quant à eux critiqués par d’autres car ils impliquent une stagnation de l’eau sans oxygène qui peut être néfaste d’un point de vue sanitaire… Bref! On a eu le droit de repartir avec des petits échantillons de Smartpots pour tester tout ça, donc dès que possible, on vous en dira plus sur notre avis personnel sur ces différentes techniques. Dans tous les cas, cette petite bataille des techniques nous a fait sourire, et on se dit que c’est un peu ça qui donne une dynamique un peu innovante et compétitive de laquelle peut ressortir de bonnes idées 🙂

Blanc de gris : de jolies pleurotes urbaines

Vous avez peut-être déjà entendu parler de productions de champignons urbains, et nous aussi, sauf qu’on avait vraiment envie de voir comment ça se passe en vrai. A Montréal, c’est Dominique de Blanc de Gris qui nous ouvre ses portes pour nous expliquer son activité de champignonniste urbaine. En tout, elles sont 3 à avoir construit cet impressionnant système de production qui devrait devenir rentable d’ici la fin de l’année, et comme avant, pour vous expliquer comment ça marche, voilà un petit dessin :

Schéma article Mtl P2 Blanc de gris

Chaque seau produit environ 4kg de pleurotes, les premières récoltes peuvent se faire environ au bout d’une semaine et une fois un bouquet de champignons coupé, celui-ci peut repousser plusieurs fois! Néanmoins, le rendement diminue assez vite (sur les 4kg, 2 sont récoltés lors de la première récolte) et il n’est pas vraiment rentable d’aller au delà de 4-5 récoltes sans changer de substrat et ensemencer à nouveau. En tout les 6 serres intérieures abritent pas moins de 900 pots ce qui nous fait une belle production mensuelle d’environ 3  tonnes et demi de pleurotes!

IMG_9893Des serres où humidité, luminosité et température sont surveillées en permanence.

IMG_9891Tout ça pour faire pousser des jolies familles de pleurotes comme celle-ci!

Côté financier, les pleurotes sont vendues environ à 25$CAN/kg (16.90eu/kg). Un prix qui peut paraître élevé, mais qui, ramené au cours du marché local et à la qualité exceptionnel du produit reste somme toute assez raisonnable. Bref, un bien beau projet basé sur une logistique méticuleuse et une passion pour la culture de champignons, nous on espère vraiment que ça va marcher !

Alvéole : l’abeille cool

Les jeunes pousses, les fruits et légumes et les champignons, quoi de mieux pour le dessert que de vous parler de miel? A la fin de notre visite de Montréal, nous sommes allés rendre visite à Alvéole, une jeune entreprise qui travaille à l’installation de ruchers urbains pour les particuliers.

Pour l’instant, Alvéole ne travaille pas beaucoup avec les institutions ou entreprises, mais a développé son travail vers l’installation et la gestion de ruches en ville. En gros, tout montréalais qui veut faire vivre une ou plusieurs colonies d’abeilles chez lui peut les contacter pour leur commander du matériel, suivre des formations à l’apiculture ou demander conseil.

Capture alvéole insta (source : instagram @alveolebuzz)

A l’échelle de la ville, Alvéole ne produit pas énormément de miel, mais permet de faire revivre ces gentilles bébêtes en milieu urbain. On a d’ailleurs  remarqué qu’une petite « controverse » existe au sujet de l’installation de nouvelles colonies d’abeilles en ville : certaines organisations tendent à dire qu’il faudrait limiter l’installation de ruches en villes car les abeilles une fois trop nombreuses vont finir par avoir des problèmes pour trouver des plantes desquelles se nourrir. Un argument valable, certes, mais peut être pas une précaution à prendre trop rapidement au sérieux car pour l’instant, toutes les ruches urbaines installées par Alvéole produisent toujours autant de miel et leurs populations semblent bien se porter.

De plus, on a appris qu’Alvéole, qui s’inscrit bien dans l’air du temps, a développé une application pour répertorier et surveiller les ruches urbaines qu’ils installent où celles déjà en place. En plus de ça, ils ont la chance d’avoir pu récupérer des données qui répertorient un nombre très impressionnant d’arbres et végétaux de la ville. Cette application est en constante évolution, elle est participative et son design est vraiment beau, plutôt cool donc! Seul bémol, elle n’est disponible pour l’instant que sur I-phone… mais bon, on espère que c’est voué à évoluer dans le futur!

Bon et puis ce qui est cool, c’est qu’on a eu le droit de repartir avec le calendrier 2015 d’alvéoles, et ça nous fait une déco plutôt sympa pour la fin de l’année 2015 🙂

calendrier alvéole instaAvril, découvre toi des tous tes fils!

Voilà, notre petit tour des initiatives entrepreneuriales de l’agriculture urbaine montréalaise est fini, mais vous vous dites sûrement qu’il manque plein de choses au tableau, sauf que comme d’habitude, le but pour nous n’est pas de vous assommer sous une liste interminable. Surtout que beaucoup de choses auxquelles vous pensez, vous y pensez justement parce que d’autres journalistes on déjà beaucoup écrit dessus, donc on vous laisse libre d’approfondir vos recherches sur l’incroyable scène d’agriculture urbaine que propose Montréal.

On va tout de même vous laisser sur 2 petits liens supplémentaires à aller visiter parce qu’on pense que ça vaut le coup d’aller y faire un petit tour :

Les Saprophytes,un collectif d’urbanistes basés à Lille qui sont allés se balader à Montréal mais aussi à Détroit, c’est une approche un peu différente de la nôtre mais vous y trouverez des infos intéressantes et de jolies photos.

Urban barns, qui cultivent fruits et légumes en intérieur, on a pas eu la chance de les rencontrer mais c’est un modèle qui peut vous intéresser.

On se retrouve très bientôt pour notre article sur New-York et les prochaines vidéos et conférences qui vont arriver à toute vitesse !

 

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